Encadrement des pénalités logistiques, sanction du dépassement des délais de paiement… Vigilance accrue requise dans les relations fournisseurs-distributeurs
Published on :
21/02/2022
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Les relations entre fournisseurs et distributeurs font l’objet d’un encadrement de plus en plus contraignant et précis. La fin d’année 2021 a ainsi été marquée par l’entrée en vigueur de nouveaux dispositifs applicables aux pénalités logistiques, et aux délais de paiement interprofessionnels.
Le renforcement notoire de l’encadrement des pénalités logistiques dans les relations fournisseurs-distributeurs
La loi Besson-Moreau, ou « loi Egalim 2 », (loi n°2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs), en principe dédiée aux relations commerciales de la chaîne alimentaire, a néanmoins introduit dans le Code de commerce un dispositif applicable à l’ensemble des relations fournisseurs-distributeurs, dédié à l’encadrement des pénalités logistiques. Les nouveaux articles encadrent les pénalités infligées par le distributeur au fournisseur (art. L.441-17 du code de commerce) et, réciproquement, les pénalités infligées par le distributeur au fournisseur (art. L. 441-18 du code de commerce) en cas d’inexécution contractuelle. Ainsi:
S’agissant des pénalités logistiques appliquées au fournisseur par le distributeur, le contrat de distribution doit désormais prévoir une tolérance suffisante (marge d’erreur établie au regard du volume de livraisons, délai suffisant d’information) et prendre en compte les circonstances indépendantes de la volonté des parties. La déduction d’office des pénalités logistique est prohibée. Par principe, la clause de pénalité ne doit viser que les ruptures des stocks. Elle peut viser, par exception, d’autres cas, sous réserve de démontrer et documenter le préjudice subi. Le délai de paiement des pénalités ne peut être inférieur au délai de paiement applicable à compter de la réception des marchandises.
S’agissant des pénalités appliquées indifféremment par le distributeur ou le fournisseur à l’autre partie, le montant des pénalités ne doit pas dépasser un pourcentage du prix d’achat des produits (donc, être inférieur à leur prix d’achat), et doit être proportionné au préjudice subi. La partie invoquant le manquement doit en apporter la preuve par tout moyen, et la partie défaillante doit bénéficier d’un délai raisonnable pour contester la réalité du grief. Par anticipation, chaque partie aura donc intérêt à documenter et tenir à jour les éléments clés de la relation commerciale (factures, registre de contrats, bons de commandes, bons de livraisons etc.).
Dans le contexte actuel des négociations annuelles et de pénurie de matières premières, la loi intègre ainsi une nouvelle pratique restrictive de concurrence au sein de l’article L. 442-1 (3e) du code de commerce. Le dispositif, en vigueur depuis le 20 octobre 2021, s’applique aux contrats en cours, qui doivent donc être mis en conformité.
Les précisions apportées par la DGCCRF sur la procédure de sanction en cas de dépassement des délais de paiement interprofessionnels
Pour rappel, l’article L. 441-10 du code de commerce prévoit plusieurs délais de paiement plafonds en cas de livraison de marchandises ou de réalisation de prestations de services entre professionnels (60 jours nets à compter de la date d’émission de la facture, 45 jours fin de mois si stipulé et non discriminatoire, etc.), dont le dépassement est lourdement sanctionné (amende maximale d’un montant de 2 millions d’euros, incluant une publication de la décision de sanction) (art. L.441-16 du code de commerce). Cependant dans de nombreux cas, ces délais plafonnés ne sont pas applicables aux contrats internationaux (voir notre article sur Legalmondo).
Alors que les délais de paiements ont fait l’objet de contrôles accrus pendant la crise, les nombreuses publications de la DGCCRF démontrent l’intérêt qu’elle porte à leur respect. Le 2 décembre 2021, la DGCCRF a publié des lignes directrices relatives à la détermination des sanctions par la DGCCRF et les DREETS pour dépassement de ces délais plafonds, concomitamment à la publication d’un rapport sur les sanctions prononcées par la DGCCRF au premier semestre 2021. Les lignes directrices décrivent les modalités de contrôle des délais de paiement par la DGCCRF et les DREETS, incluant les points principaux suivants :
Description du déroulement de l’enquête et de ses suites (Articles L.450-1 et s. du code de commerce) :
• Périmètre temporel et matériel du contrôle : les factures intragroupes sont exclues et l’examen limité, sauf exceptions, à une période d’un an correspondant au dernier exercice comptable clos.
• Type de documents demandés à l’entreprise contrôlée : k-bis, balance fournisseurs sous format numérique, grands livres fournisseurs/clients, échantillon de factures et preuves de leur paiement, liasses fiscales du dernier exercice clos, etc.
• Déroulé de la phase contradictoire : l’entreprise doit pouvoir présenter ses observations et produire les justificatifs correspondant aux manquements constatés.
• Modalité de sanction : L’amende, indiquée dans la lettre de décision de sanction administrative puis publiée dans un communiqué, peut être prononcée indépendamment du prononcé d’un avertissement ou d’une injonction préalable.
• Recours pouvant être exercés suivant le prononcé d’une sanction: recours administratifs et/ou contentieux.
Fixation du montant de l’amende : La méthodologie de détermination du montant de la sanction est harmonisée entre les autorités de contrôle puis adaptée à chaque cas d’espèce :
• Le critère essentiel est le montant de la rétention de trésorerie trouvant sa source dans le défaut de respect des délais, calculé en additionnant les gains en besoins de fonds de roulement (BFR) générés par les retards.
• Si une entreprise est soumise à plusieurs délais légaux de paiement, le plafond du montant de la sanction est calculé par référence à la somme des amendes encourues.
• La phase contradictoire permet de justifier les manquements reprochés. L’application du principe comply or explain, permet une diminution de la sanction ou un échelonnement des paiements, à condition de pouvoir établir la preuve des justifications alléguées.
L’entreprise aura tout intérêt à documenter et tenir à jour tout élément lié à la facturation, au respect des délais et aux événements justifiant tout retard.
Points clefs à retenir :
• En matière de pénalités logistiques, tous les contrats doivent se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation, qui durcit les conditions de mise en œuvre de telles sanctions contractuelles. Ce durcissement accroît le risque de contestation des clauses de pénalités, il conviendra donc de documenter les éléments justifiant tant leur principe que leur montant.
• En matière délais de paiement, la méthodologie de détermination des sanctions publiée par la DGCCRF doit pousser les acteurs économiques à être particulièrement vigilants et à documenter et archiver tous les éléments liés à la question du paiement en vue d’un éventuel contrôle, afin de justifier les éventuels manquements constatés ou réduire le montant de la sanction encourue.
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